Tiphaine Raguenel dame du Guesclin (1335-1372)

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Née en 1323
Morte à Dinan en 1379

Elle était belle comme une fée, il était laid comme le diable. Elle lisait l’avenir dans les astres, il savait à peine signer son nom. Ils n’auraient jamais du se connaître, et pourtant le destin les fit se rencontrer un beau jour de 1359 à l’issu d’un combat dont elle avait prédit qu’il serait le vainqueur. Leur histoire d’amour allait franchir les frontières du temps et étonner leurs contemporains devant cette union de la Belle et de la Bête.

C’est au manoir de la Bellière près de Dinan, demeure de son père, que naquit Tiphaine Raguenel en 1335. Elle était la dernière enfant et la seule fille du ménage Raguenel. Son père, Robert III Raguenel et sa mère Jeanne de Dinan, étaient de vieille noblesse bretonne : ils avaient déjà eu deux fils, Guillaume et Olivier, et l’arrivée de cette fillette blonde les enchanta.

Cependant, très tôt, Tiphaine se révéla une enfant de santé fragile, elle avait les bronches délicates et eut des crises d’asthmes qui faisaient craindre pour sa vie. C’est peut être pour cela que sa mère la confina au château, lui confiant des tâches ménagères, telles que le le filage de la laine et la broderie. Mais très tôt, Tiphaine se passionna pour la librairie de son père, et se plongea avec délices dans les livres de sciences, puis bientôt d’astrologie.

On dit qu’un moine se chargea de lui donner ses premiers rudiments en cette matière, et bientôt l’adolescente sut déchiffrer l’avenir dans les étoiles et dresser des tablettes où les chiffres savants lui permettaient de lire l’avenir.

 

Tiphaine Raguenel et Bertrand Du Guesclin

A une époque où la sorcellerie pouvait conduire au bûcher, Tiphaine n’eut jamais à redouter ce genre d’accusation : elle était très pieuse et soignait avec sa mère les malades qui venaient quémander de l’aide et des soins. Tout au long de sa vie, elle dénouera les cordons de sa bourse pour donner de l’argent aux pauvres. C’est ainsi que les petites gens la surnommèrent la Fée Tiphaine. Pour eux, elle possédait un don qui lui permettait de lire l’avenir. Tiphaine leur répliquait alors : « Ce n’est pas par don qu’il m’arrive de prédire l’avenir mais par l’étude du ciel où Dieu de toute éternité a écrit le destin des hommes ».

Isolés dans leur manoir de la Bellière, les Raguenel n’en suivaient pas moins les événements dramatiques qui secouaient la Bretagne. En 1341, le duc Jean III de Bretagne était mort sans enfants, et sans avoir désigné de successeur sur le trône ducal. Aussitôt deux partis se présentèrent à sa succession : d’un côté, Charles de Blois et sa femme Jeanne de Penthièvre (fille du frère du duc Jean III) soutenus par le roi de France, et de l’autre, Jean de Montfort (demi- frère du duc Jean III) réfugié à la cour d’Angleterre. De plus, dans le contrat de mariage de Charles de Blois il était stipulé qu’il serait le prochain duc si Jean III mourrait sans enfants.

Fort de cet écrit, Charles de Blois continua de réclamer le trône de Bretagne, mais Jean de Montfort fut le plus rapide : il s’empara du trésor ducal du défunt duc entreposé à Limoges et s’empara de Nantes où il fut couronné duc de Bretagne. Il s’empressa de recruter une armée de mercenaires à sa solde. Quant à Charles de Blois, il se rendit auprès du roi de France, Philippe VI, qui le reconnut comme seul duc de Bretagne. Ainsi devait commencer une guerre qui devait durer vingt ans et qu’on appela la guerre des Deux Jeanne du nom des deux épouses des deux prétendants.

Les Raguenel étaient pour Charles de Blois, et le père de Tiphaine se battait pour lui. C’est ainsi qu’il participa au Combat des Trente le 26 mars 1351 : trente chevaliers bretons affrontèrent trente chevaliers anglais en un duel à la loyal qui dura toute une journée. Les Bretons furent les vainqueurs de ce combat, et aussitôt cet exploit redonna courage aux partisans de Charles de Blois. La gloire de Robert III Raguenel rejaillit sur sa fille, et elle fut dès lors assaillie de propositions de mariages. Elle les refusa toutes. Sa famille eut beau l’interroger sur ses raisons, elle ne voulut rien leur dire.

C’est que toutes les pensées de Tiphaine étaient alors tournées vers un certain Bertrand Du Guesclin, un breton de trente et un ans, qui, réfugié dans la forêt de Paimpont poursuivait une guerre de maquis contre les Montfortistes (partisans de Jean de Montfort) et leurs alliés anglais qui lui avaient donné le surnom de « Dogue Noir de Brocéliande ».

Bertrand et sa bande harcelaient les troupes anglaises, pillaient leurs ravitaillements et s’efforçaient de les surprendre à toute heure du jour et de la nuit. La réputation de Du Guesclin commençait à être connue à travers toute la Bretagne.

En 1354, il fut fait chevalier au château de Montmuran par Alcastre de Marest alors qu’il venait de capturer un brillant capitaine de guerre anglais, Hugh de Calverley. Devant prendre une devise pour sa bannière, Du Guesclin choisit celle-ci : « le courage donne ce que la beauté refuse ».

En effet, Bertrand Du Guesclin était la laideur personnifiée : noir de peau, noir de poil, il avait un cou de taureau, des yeux gris exorbités, et une taille moyenne qui lui donnait l’allure d’un rustaud. Mais habillé en armure, et une lance à la main sur son cheval, il n’y avait personne qui ne l’égalait par la prestance et l’habileté de sa force. Le chevalier inspirait le respect, mais l’homme lui même la répulsion. Sa propre mère, Jeanne de Malemains l’avait repoussé avec horreur le jour de sa naissance, maudissant le sort qui lui avait donné un fils aussi laid. Elle l’ignorera toute sa vie, alors même qu’elle montrera une affection maternelle vis à vis de ses autres enfants : Olivier, Guillaume, Robert, Agathe, Loyette, Jeanne, Colette, Clémence et Julienne.

En grandissant, Bertrand Du Guesclin, (repoussé par ses parents, car même son père ne lui manifestait pas plus de reconnaissance), devint un vrai sauvage : il se battait avec ses compagnons de jeux, et rentrait souvent au logis paternel la lèvre ouverte, les cheveux défaits, exaspérant un peu plus sa mère qui lui prédisait qu’il finirait mal. Repoussé par sa mère, et en grandissant, repoussé par les femmes, Bertrand Du Guesclin se lança dans la guerre et les armes avec fougue, et il apparut bientôt que son génie militaire n’avait pas d’égal.

En 1359, Bertrand Du Guesclin venait de participer au siège de Melun où le Régent (le futur Charles V, fils de Jean le Bon alors prisonnier en Angleterre) admira son courage. Le premier contact entre les deux hommes allait entraîner une amitié qui dura jusqu’à leur mort respective. Vite rappelé par Charles de Blois en Bretagne, Bertrand Du Guesclin se trouva aux abords de Dinan au début de l’été 1359. Une trêve venait alors d’être signée entre bretons et anglais, or le jeune frère de Bertrand, Olivier Du Guesclin, avait été fait prisonnier par le chevalier anglais Thomas de Cantorbéry, qui au mépris de la trêve, entendait bien toucher une forte rançon avant de rendre la liberté à son prisonnier.

 

Bertrand du Guesclin

Bertrand apprit la capture de son frère, piqua une colère monstre, et sans attendre se présenta en armes au camp anglais où il provoqua en duel le chevalier anglais félon. Le duc de Lancastre, fils du roi Edouard III permit la rencontre, et le duel fut autorisé le lendemain, sur la grande place de Dinan. En un quart d’heure, Bertrand Du Guesclin fondit sur son adversaire, lui troua d’un coup de masse son armure, et fit tant et si bien que le malheureux demanda grâce sur le champ, et reconnut ses torts. Olivier Du Guesclin fut libéré sur le champ, et Bertrand fêta sa victoire en sa compagnie au logis du Gouverneur à Dinan.

C’est là qu’on le mit en présence de Tiphaine Raguenel, qui avait prédit la victoire de Du Guesclin dans ce duel sans merci. Intimidé, le chevalier à la laideur repoussante n’osa engager la conversation, et ce fut le père de Tiphaine qui le félicita avec chaleur. Mais le premier regard entre Tiphaine et Bertrand avait noué des liens qui n’allaient plus se défaire. Durant les quatre années qui suivirent, Bertrand Du Guesclin se rendit chaque fois qu’il le pouvait au manoir de La Bellière pour rencontrer Tiphaine. A chaque fois, la guerre le rappelait et il repartait sur le champ.

En 1360, ayant été fait prisonnier par les Anglais, et aussitôt libéré sur parole, il avait été trouvé le roi de France, Charles V (qui avait payé sa rançon) et qui l’avait nommé gouverneur de Pontorson, près du Mont Saint Michel. Deux ans plus tard, le roi de France le nommera capitaine souverain du duché de Normandie.

Tiphaine qui désespérait de ne jamais voir Bertrand Du Guesclin se confia un jour à Jeanne de Penthièvre, l’épouse de Charles de Blois, le prétendant au trône de Bretagne. Celle-ci qui voyait Du Guesclin plus souvent que Tiphaine, puisqu’ il passait son temps entre la cour du roi de France à Paris (où il recevait ses ordres) et celle de Charles de Blois, poussa le chevalier à demander la main de la demoiselle Raguenel.

L’idée finit par faire son chemin dans l’esprit de Du Guesclin, et en 1363, après un mois de captivité chez les Anglais, qui lui avait permis de mieux réfléchir à sa situation, Bertrand se rendit directement à La Bellière et demanda la main de Tiphaine Raguenel. Le père et la mère de la jeune fille venaient de mourir à quelques mois d’intervalle, et la jeune fille était placée sous la tutelle de son frère Guillaume qui deviendra, par la suite, l’un des lieutenants de Du Guesclin. Elle accepta avec joie de devenir sa femme, et le couple se maria à Dinan. Jeanne de Penthièvre assista au mariage : Bertrand Du Guesclin avait alors quarante quatre ans, Tiphaine, vingt huit.

Ils passèrent leur lune de miel à Pontorson, mais elle fut de courte durée, car Charles V rappela Du Guesclin à Paris. Celui-ci se rendit en Normandie où il remporta la victoire de Cocherel. Pour le récompenser, Charles V le fit comte de Longueville, et aurait bien aimé le garder près de lui à Paris. Mais Bertrand refusa, car il était avant tout breton, et dévoué à Charles de Blois qui se préparait à rencontrer dans une grande bataille qui serait décisive pour l’avenir de la Bretagne, le fils de son vieil adversaire Jean de Montfort (mort en 1345), qui se prénommait aussi Jean et qui devait devenir Jean IV de Bretagne.

Cette bataille fut celle d’Auray qui eut lieu le 29 septembre 1364 et qui fut un vrai désastre pour les partisans de Charles de Blois : ce dernier devait mourir transpercé de dix sept lances, et Du Guesclin se retrouva une nouvelle fois fait prisonnier après qu’on eut réussit à le mettre à bas de son cheval, du haut duquel il s’efforçait de trancher la tête de ses ennemis d’un coup de hache sanguinolente.

Blessé et épuisé, il se rendit au fils de Jean de Montfort qui allait devenir le duc Jean IV de Bretagne. Ce dernier fixa la rançon de Du Guesclin à 100 000 florins, somme exorbitante pour un simple capitaine, mais les Anglais (partisan du nouveau duc) commençaient à entrevoir que ce Du Guesclin leur donnerait bien du fil à retordre.

Le Logis de Tiphaine au Mont Saint Michel (il se visite)

Seul le roi de France se proposa de payer la rançon de Du Guesclin. Il réussit à réunir la moitié de la somme, et le pape l’autre moitié. Quelques mois plus tard, Du Guesclin était libéré, et il s’en alla retrouver Tiphaine à Pontorson avant de se rendre à nouveau à Paris pour remercier Charles V. Avant qu’il ne la quitte, Tiphaine lui confia une de ses tablettes où elle avait marqué les chiffres néfastes pour son époux :

En janvier : le 1er et le 7

En février : le 3 et le 4

En avril : le 10 et le 11, il fallait craindre la mort.

En mai : le 3 et le 7

En juin : le 10 et le 15

En août : le 1er et le 2

En septembre : le 3, le 10 et le 29 comportaient des maladies graves pouvant entraîner la mort.

En octobre : le 3 et le 5,

En décembre : se garder des natifs du signe du Poisson !

Se doutait elle qu’elle ne le reverrait plus pendant cinq ans ? Avant de partir, Du Guesclin se montra prudent, et demanda à Tiphaine de prendre résidence désormais au Mont Saint Michel. D’une part Tiphaine serait à l’abri des pillards qui sillonnaient toujours le pays, ensuite elle pourrait consulter à sa guise la riche bibliothèque de l’Abbaye du Mont et surveiller ce ciel où elle savait si bien déchiffrer les astres. Lorsque Du Guesclin s’éloigna du Mont Saint Michel, Tiphaine était en larmes. Au chagrin de le voir partir une nouvelle fois s’ajoutait le fait qu’elle ne lui avait toujours pas donné d’enfant, il est vrai qu’ils étaient si peu ensemble !

Du Guesclin retrouva Charles V à Paris, au Louvre, qui lui confia une mission importante : celle de rassembler les Grandes Compagnies, ces bandes disparates de soldats qui se mettaient à la solde des Anglais, et pillaient les riches campagnes de France, et les conduire en Espagne, où une nouvelle guerre avait lieu entre Pierre le Cruel, roi de Castille qui voyait ses droits au trône disputés par son propre demi-frère Henri de Trastamare, qui était soutenu par le roi de France. En effet, Pierre le Cruel était soupçonné du meurtre de son épouse, la jeune Blanche de Bourbon, sœur de la reine de France Jeanne de Bourbon alors épouse de Charles V. Sachant que son rival Trastamare aurait le soutien des troupes françaises, Pierre le Cruel s’allia avec les Anglais.

Lorsqu’il arriva en Espagne avec les Grandes Compagnies, Bertrand Du Guesclin réussit à chasser et à battre Pierre le Cruel, qui trouva refuge à Bordeaux, auprès du Prince Noir, le fils du roi anglais Edouard III. Henri de Trastamare prit le trône de Castille et se fit couronner sous le nom de Henri II. En remerciement de ses services, il remit à Du Guesclin le duché de Trastamare et de Molina, ainsi que le royaume de Grenade. Pendant plusieurs mois encore, Du Guesclin resta en Espagne pour finir de pourchasser les partisans de Pierre le Cruel mais il ne manquait pas d’informer Tiphaine de ses exploits. C’est ainsi que cette dernière apprit qu’elle était duchesse de Molina.

Pendant les deux ans où Du Guesclin demeura en Espagne, la correspondance entre lui et Tiphaine ne fut pas interrompue. Reçu régulièrement à la cour d’Henri II, Du Guesclin y fit la rencontre de celle qui allait devenir sa maitresse. On ne connaît pas son nom exacte, mais ses contemporains l’appelait « la dame de Soria » car elle était originaire de cette ville. Bertrand Du Guesclin devait avoir deux fils avec cette jeune femme : Bertrand de Torres et le marquis de Fuentes. Les deux fils restèrent en Espagne lorsque leur père repartit en France.

Or, après deux ans de règne, Henri II avait provoqué bien des mécontentements, et la nouvelle que Pierre le Cruel s’en revenait de Bordeaux avec des troupes fraîches, provenant des rangs anglais galvanisa le nouveau roi désireux d’en découdre une bonne fois pour toute avec son demi-frère tant haï.

N’écoutant pas les conseils de Du Guesclin, Henri II se jeta dans la bataille à Navarette. Il fut défait mais réussit à s’enfuir, contrairement à Du Guesclin, qui fut une nouvelle fois fait prisonnier par les Anglais, qui l”expédièrent au Prince Noir à Bordeaux. Cette fois sa rançon fut fixée à 60 000 écus ! Bien conscient qu’il aurait du mal à réunir une telle somme, Du Guesclin promit de la réunir, et il fut rendu à la liberté.

Du Guesclin se rendit à Paris, mais Charles V fut incapable de lui fournir le montant de cette rançon, le trésor étant une nouvelle fois à sec. Pas découragé, Bertrand Du Guesclin se rendit alors près de Tiphaine au Mont Saint Michel, où son épouse avait déjà fait fondre sa vaisselle, ses bijoux en or, et tout l’or que son époux lui avait fait parvenir d’Espagne plusieurs mois auparavant.

La somme n’étant pas suffisante, Bertrand Du Guesclin, fidèle à sa parole, retourna à Bordeaux pour se constituer prisonnier conformément aux termes de sa libération. Là, une surprise l’attendait, le duc d’Anjou, frère de Charles V, avait réussi à réunir la rançon et il était libre à nouveau. Aussitôt il répondit à l’appel à l’aide d’Henri II roi de Castille, il réunit ses troupes et fonça vers l’Espagne. A la bataille de Montiel, Henri II terrassa Pierre le Cruel et lui trancha la gorge lors d’un duel singulier. Il était à présent le seul roi de Castille.

Bertrand Du Guesclin revit il à cette occasion la dame de Soria et ses fils ? C’est fort possible car Henri II venait de lui donner la ville de Soria en récompense de ses services. D’ailleurs, le roi de France qui avait toujours besoin de ses services dut insister lourdement et longuement pour que Du Guesclin consente à quitter l’Espagne pour prendre de nouveau le chemin des batailles. Il quitta l’Espagne en 1370, et se rendit à Paris, où au cours d’une superbe cérémonie le roi Charles V le nomma au grade de Connétable de France. Tiphaine lui avait dit qu’il atteindrait tous les honneurs militaires, et que les astres lui seraient favorables, mais il ne l’avait pas cru.

Bertrand du Guesclin est nommé Connétable de France

C’est auprès d’elle qu’il voulut fêter sa nomination ; il retrouva Tiphaine amaigrie et malade, et il resta plusieurs semaines à son chevet, au Mont Saint Michel. Pendant les absences de son mari, Tiphaine avait continuer à visiter les pauvres et soigner les pèlerins du Mont. Tout au long de l’année 1371, Du Guesclin demeura au Mont près de son épouse, mais au début de l’automne, la guerre le rappela de nouveau, cette fois il dut se rendre en Poitou où il combattit les Anglais.

C’est là, au début de l’année 1372 qu’une missive lui apprit la mort de son épouse. Celle que les petites gens appelaient « la fée Tiphaine » venait de rendre son dernier souffle au couvent des Jacobins de Dinan. Elle avait demandé à ce que son cœur et ses viscères furent enfermés dans un reliquaire de plomb et confiés aux Jacobins de Dinan.

Après le décès de Tiphaine, Du Guesclin se consacra à sa tâche de Connétable de France : il reprit la province du Poitou aux Anglais, la Saintonge et l’Aunis ainsi que de nombreuses places normandes : il devait finir sa carrière en Auvergne, nettoyant le pays des Grandes Compagnies (qui à la fin de la guerre espagnole entre Pierre le Cruel et Henri II étaient remontées vers la France pillant tout sur leur passage).

Le château de Montmuran où Bertrand Du Guesclin fut fait chevalier et où il se maria pour la deuxième fois

La mort dans l’âme, Bertrand Du Guesclin accepta, sur ordre du roi Charles V, de se remarier avec Jeanne de Laval Tinténiac, fille elle aussi de l’un des trente chevaliers bretons qui s’étaient brillamment battus au Combat des Trente en 1351. Le mariage eut lieu à Montmuran le 21 janvier 1371, mais ce n’était pas un mariage d’amour : la mariée (de dix neuf ans) ne semblant guère éprise de cet homme si laid, et âgé de cinquante quatre ans. D’ailleurs ce mariage ne fut pas plus fécond que le premier. A la mort de Du Guesclin, Jeanne de Laval attendra dix ans pour se remarier avec son cousin Gui II de Laval à qui elle donnera quatre enfants.

La mort du Connétable Du Guesclin fut rapide et stupide : lors du siège de Chateauneuf de Randon, en Auvergne, il but de l’eau croupie, se sentit mal et mourut trois jours plus tard. Son corps fut alors réparti en quatre sépultures : il avait voulu que son corps repose en Bretagne mais la route était longue de l’Auvergne à Dinan. On décida alors de l’embaumer : ses viscères et son cerveau furent déposer au couvent des Dominicains du Puy en Velay. Mais mal réalisé l’embaumement ne tarda à accélérer la décomposition du corps. A l’étape de Clermont Ferrand, on fut obligé de faire bouillir le corps (pour détacher les os des chairs) et le chairs furent ensevelis au couvent des dominicains de Montferrand.

Le gisant de Du Guesclin à la Basilique Saint Denis

Seuls son cœur (déposé dans une urne) et ses os reprirent alors la route vers la Bretagne, mais en cours de chemin, le roi Charles V réclama les ossements car il souhaitait que Du Guesclin repose au milieu des rois dans la basilique de Saint Denis. Aussi, seul le cœur poursuivit sa route vers Dinan, où il fut réuni à celui de sa première épouse Tiphaine.

On peut encore voir son gisant dans la basilique de Saint Denis où il repose au milieu des rois de France. A la Révolution française, le 20 octobre 1793, sa sépulture fut ouverte : « l’on découvrit son squelette tout entier, la tête bien conservée, les os bien propres et tout à fait desséchées ». Les ouvriers jetèrent les os dans une fosse commune au nord de la Basilique et son cercueil de plomb fut fondu.

De même au Puy en Velay, les révolutionnaires profanèrent le tombeau des viscères de Du Guesclin mais l’urne échappa à la fosse commune, et on l’inhuma dans l’église Saint Laurent. A Clermont Ferrand, les révolutionnaires détruisirent le tombeau contenant ses chairs, ainsi que le couvent des dominicains, dont il ne reste rien. A Dinan, on se contenta de déplacer l’urne de Du Guesclin des couvents des Jacobins de Dinan, à l’église Saint Sauveur de Dinan où elle repose toujours.

Quant à Tiphaine, son corps connut apparemment aussi des vissicitudes : en 2012, l’on retrouva un crâne à Dinan (conservé dans un reliquaire) qu’on attribua à l’épouse de Du Guesclin. La bibliothèque de Dinan le reçut en don anonyme. Reste à savoir s’il s’agit bien du crane de Tiphaine ?

Le couple Tiphaine/Bertrand n’ayant pas eu d’enfants, la postérité de ce dernier continue dans sa descendance illégitime (née de sa liaison avec la dame de Soria) et perdure encore aujourd’hui en Espagne.

Lafouine 77

 

Sources :

  • Wikipedia
  • Tiphaine Raguenel, éditions Perrin.

Une réflexion sur « Tiphaine Raguenel dame du Guesclin (1335-1372) »

  1. * Quelle vie !
    * Je connais un peu le fameux Du Guesclin pour ses conquêtes et les châteaux repris aux Maudits Anglois.
    * Mais j’avoue que sa belle m’était inconnue.
    * Il est vrai que je ne regarde point les femmes des autres… Chevalier je suis.
    ** J’ai noté un détail :
    *** Il a fait sa demande en mariage après son emprisonnement.
    Question :
    1 – A-t-il imaginé que le mariage est comme une prison ?
    2 – Est ce qu’il faut encore être emprisonné pour quémander une damoiselle au 21ème siècle ?

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