Sofia Clavone, comtesse de Witte, comtesse Potocka (1760-1822)

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S.Potocka_BVLampСофия Константиновна Потоцкая

Portrait en “Vestale” en 1791 par Johann Baptist Lampi

Née le 12 janvier 1760 à Bursa, Turquie
Morte le 24 novembre 1822 à Berlin
Enterrée à Talnoe (Talne en Ukraine) dans la crypte de l’église

Sofia Clavone naquit dans la ville turque de Bursa le 11 janvier 1760. Son père, Constantin Clavone était un pauvre marchand de moutons (certains disent qu’il était boucher), et sa mère, Maria, une beauté locale. Lorsque Sofia eut douze ans, la famille déménagea dans la grande ville de Constantinople, et s’installa dans le quartier grec de Phanar. Sofia et sa sœur vécurent dans ce quartier jusqu’à la mort inopinée de son père, lorsque la jeune fille eut atteint ses quinze ans. Sa mère fut obligée de se remarier à un arménien pour survivre.

imagesConstantinople

En 1776, toute la famille perdit sa maison lors du grand feu qui ravagea Constantinople. La mère de Sofia y perdit son deuxième mari, et elle entreprit de demander de l’aide à l’ambassadeur polonais, Boskamp Lyasopolskomu. Ce dernier, séduit par la détresse de cette mère, et de ses deux jeunes et jolies filles, consentit à les aider, mais en contrepartie, il réclama la jeune Sofia comme maitresse en échange de 1 500 piastres.

38907764_1_xSofia Clavone en 1780

La mère accepta sans sourciller de monnayer sa fille, et Sofia s’installa avec sa famille dans un coin de l’ambassade. Sofia et sa soeur apprirent le français avec les filles de l’ambassadeur polonais (car il était bien sûr marié). La mère de Sofia décida d’utiliser la beauté de ses filles pour survivre, et quelques mois plus tard, la sœur ainée de Sofia rejoignait le harem du pacha turc en tant que concubine.

Quant à Sofia, pendant deux ans, elle devint la maitresse de l’ambassadeur polonais. Rappelé à Varsovie le 27 mai 1778, Boskamp Lyasopolskomu installa la jeune fille à Constantinople dans un appartement loué chez l’interprète turc de l’ambassade, et mis sur la banque au nom de Sofia la somme de 1 500 piastres à titre de dot. Mais la jeune fille n’était toujours pas libre de ses mouvements.

imagesSofia Clavone comtesse de Witte, en “Flore” en 1795 par Auguste Ritt

En effet, en décembre 1778, Sofia reçut l’ordre de rejoindre l’ambassadeur polonais à Varsovie : en effet ce dernier lui promettait de lui trouver un riche marchand polonais pour mari, lui ne pouvant (et ne voulant) l’épouser puisqu’il était déjà marié.

Sofia se mit en route en janvier 1779 pour rejoindre la capitale polonaise, en compagnie des tuteurs nommés par Boskamp, et voyagea à travers la Bulgarie : en avril, elle arriva à Kamenets Podolsk en Ukraine Elle y rencontra le commandant du fort local, Joseph de Witte (d’origine hollandaise) qui tomba amoureux d’elle. Déjouant la surveillance dont elle était l’objet, Sofia rejoignit le fougueux officier qui lui proposa le mariage. Désireuse de quitter son état d’esclave sexuelle, la jeune femme accepta.

imagesKamenets Podolsk

Le jeune couple se maria le 14 juin 1779 dans l’église catholique du village de Zinkovtsy, sans l’autorisation des parents du jeune homme. Sofia avait alors dix-neuf ans, et Joseph de Witte en avait quarante. C’était un bel homme qui était devenu lieutenant général dans l’armée russe et avait la faveur de l’impératrice Catherine II.

Le jeune couple passa deux ans à Kamenetz Podolsk où le mari détenait le titre de commandant de la forteresse russe, puis le comte de Witte emmena en 1781 sa jeune épouse pour un tour de l’Europe. Dans toutes les capitales d’Europe, la beauté de la jeune femme va susciter l’admiration de tous.

Stanislas_August_PoniatowskiStanislas Auguste Poniatowski, roi de Pologne  (amant de Sofia)

Leur première halte se fit à Varsovie en mars 1781, où Sofia de Witte fut présentée au roi Stanislas Auguste, grand amateur de jolies femmes. Pendant les deux mois de leur séjour, la jeune femme y fit sensation de par sa beauté, et sa conversation. Ses contemporains la décrivaient ainsi : « belle comme un rêve, dotée de magnifiques yeux noirs, c’était une jeune fille dotée des charmes langoureux des beautés du sud, entrainant le cœur des jeunes hommes qui la croisaient et suscitant l’envie chez les dames de son entourage ».Après Varsovie, le jeune couple se rendit à Berlin, où ils rencontrèrent le roi de Prusse Frederick II, puis ils s’arrêtèrent dans la ville balnéaire de Spa où Sofia fut présentée à l’empereur Joseph II (venu ici en cure), qui recommanda vivement le jeune couple à sa sœur la reine de France Marie Antoinette d’Autriche, lorsqu’ils exprimèrent le désir de se rendre en France, à Versailles.

170px-Charles_X_of_FranceCharles comte d’Artois (futur Charles X) par Jean Martial Fredou en 1773 (amant de Sofia)

La reine de France accueillit le jeune couple à Trianon, où Sofia de Witte attira les regards du jeune comte d’Artois, frère de Louis XVI. Cet incorrigible séducteur semble avoir mis la jeune femme dans son lit. Elisabeth Vigée Lebrun fera un portrait de Sofia, elle relatera dans ses mémoires que « la jeune femme était vraiment très belle, mais qu’elle le savait et qu’elle en jouait outrageusement ».

Pendant leur séjour à Paris, Sofia de Witte accoucha de son premier enfant, Ivan, le 17 novembre 1781 : les contemporains chuchotèrent que le père n’était autre que le roi de Pologne, qui s’empressa de revendiquer son titre de parrain de l’enfant.

vlbpotockaSofia Clavone comtesse de Witte, par Elisabeth Vigée Lebrun en 1781

En 1782, le couple revint à Kamenetz en ayant fait halte à Vienne après avoir traversé la Moravie et la Slovaquie. Cette année là, le père de Joseph de Witte mourut, et Sofia prit le titre de comtesse de Witte. Son mari reçut du ministre russe Grigori Potemkine le grade de commandant de Kherson, et 6000 roubles de salaire par an.

La première mention de la liaison de Sofia (âgée de vingt-neuf ans) et de Grigori Potemkine (âgé de cinquante ans) date de 1789 : à cette date, elle est l’invitée d’honneur du camp militaire d’Otchakov, où le prince Potemkine ordonna des bals et des collations dont la belle comtesse de Witte est l’invitée d’honneur. A cette époque, son mari se vit conférer le grade de général de l’armée russe.

G.PotemkineGregori Potemkine (amant de Sofia)

Ancien favori de Catherine II, Potemkine avait encore du pouvoir vis-à-vis de son ancienne maitresse, c’est ainsi qu’il obtint pour sa nouvelle maitresse une immense propriété en Biélorussie, et plusieurs bijoux, colliers et boucles d’oreilles ornés de diamants. Mais le prince Potemkine meurt en 1791, dans les bras d’une autre de ses maitresses, laissant Sofia sans protecteur.

Dans le courant de l’année 1792, Sofia rencontra celui qui allait devenir son deuxième époux, le plus riche magnat de l’Ukraine : un comte général polonais du nom de Stanislav Schensny Potocki, ; c’était un homme marié de quarante ans (il avait onze enfants de sa deuxième épouse Jozefa Mniszech) et le coup de foudre entre Stanislav et Sofia fut immédiatement réciproque. Elle devint rapidement sa maitresse, et lui donna trois enfants illégitimes Konstantin (né en 1793), Nikolai (né en 1794) et Helena (née en 1797).

S.Potocka_BVLampSofia Clavone comtesse de Witte, par Johann Baptist von Lampi en 1795

Potocki, amoureux fou de Sofia, proposa à Joseph de Witte, époux de Sofia d’engager une procédure de divorce en échange de deux millions de zlotys. Le mari de Sofia accepta (sa femme était devenue depuis plusieurs mois la maitresse de Potocki et l’avait quitté) et la jeune femme entama la procédure : elle obtint un divorce catholique légal en février 1796. Quant à Potocki, il divorça de son épouse seulement après la mort de Catherine II en 1798.Potocki épousa Sofia le 17 avril 1798 dans une cérémonie orthodoxe à Toultchine, Sofia était alors enceinte de son fils Alexandre qui naitra à la fin de l’année 1798, et qui devait devenir son fils préféré. Après ce mariage, elle devint officiellement Sofia Potocka.

S.PotockiStanislav Potocki par Johann Baptist von Lampi en 1789 (2ème mari de Sofia)

Le couple devait avoir en tout huit enfants (dont trois nés avant mariage) dont deux filles, Olga (née en 1803) et Sophia (née en 1801) qui eurent la beauté de leur mère en héritage. Potocki était tellement amoureux de Sofia qu’il lui construisit un superbe jardin dans sa propriété ukrainienne qu’il baptisa du nom de « Sophievka » et qui lui coûta plusieurs millions de zlotys.

Au moment de son troisième mariage, Potocki venait de prendre sa retraite de général d’infanterie de l’armée russe : c’est ainsi qu’il se retira avec Sofia sur ses terres de Tulczyn en Ukraine (232 km au sud-ouest de Kiev) où les Potocki possédait un palais magnifique (qui existe toujours).

PalaisLe palais Potocki à Tulczyn

Le ménage fut heureux malgré les crises de mysticisme de Stanislav vers la fin de sa vie, jusqu’au jour où Sofia tomba amoureuse de son beau-fils, Feliks Georg Potocki (issu du précédent mariage de Potocki) et de seize ans plus jeune qu’elle. Les rumeurs disaient qu’il était probablement le père du dernier enfant de Sofia : Boleslaw. Son mari (qui semble n’avoir pas soupçonné la liaison de sa femme) eut le bon gout de mourir le 15 mars 1805, et Sofia rompit sa liaison avec son beau-fils qui devait mourir en 1810 sans s’être jamais marié.

imagesSofia comtesse Potocka en 1797 par Herbert Maurer

L’héritage du comte Potocki fut difficile pour Sofia Potocka : en effet, le comte Potocki avait onze enfants de son premier mariage, et tous se liguèrent contre leur belle-mère désirant prouver que le deuxième mariage de leur père n’était pas légitime, et que les enfants nés de cette union étaient des bâtards inaptes à devenir héritiers du comte Potocki. De plus, selon la loi civile polonaise une veuve à la mort de son époux retrouvait sa dot et une part du patrimoine de son époux décédé. Mais comme Sofia n’avait pas eu de dot pour ce deuxième mariage, son droit d’accès à l’héritage de son époux était nul.

La comtesse Potocka décida alors de se rendre auprès du seul homme apte à l’aider : l’empereur de Russie. Avec l’accord de son beau-fils Feliks (avec qui elle était restée en bons termes) elle se rendit à Saint Petersbourg et demanda une audience à l’empereur grâce à l’aide du gouverneur de ce dernier, Nikolai Novosiltsov, qui était aussi l’un de ses admirateurs (les mauvaises langues disaient qu’il était son amant). Le tsar accorda sa protection à la veuve Potocki, et Sofia garda la totalité de l’héritage de son défunt époux au grand dam de ses beaux enfants.

imagesSofia comtesse Potocka en 1805

Prudente, dans le testament qu’elle rédigera quelques mois plus tard, Sofia Potocka lèguera tout à ses enfants, c’est-à-dire 60 millions de roubles sans compter les palais et les terres des Potocki.

Au début des années 1820, Sofia tomba gravement malade d’un cancer. Elle décida alors de se rendre à Berlin pour y rencontrer des docteurs plus compétents. A Berlin, les spécialistes réussirent à combattre son mal pendant quelques mois, mais Sofia Potocka devait mourir à Berlin le 24 novembre 1822, âgée de 62 ans. Elle demandera à ce que son corps soit ramené en Ukraine et elle sera enterrée à Talnoe (où le corps de sa fille Olga la rejoindra en 1861).

Sa descendance eut des destins variés :

Le fils né de son premier mariage (celui qui était né à Paris), Ivan de Witte (1781-1840) deviendra un général dans l’armée russe, se maria deux fois mais ne laissera pas d’héritier de ses deux mariages.

Witte_Ivan_OsipovichIvan de Witte par école russe (fils ainé de Sofia)

Son fils ainé né de son mariage avec Potocki, Alexandre, (1798-1868) était le favori de sa mère. A sa mort, il héritera du domaine d’Ouman en Ukraine et de son parc immense ; mais il prit part à l’insurrection de la Pologne qui finit en défaite, le tsar lui confisqua ses terres et les donna à sa femme l’impératrice. Alexandre finit sa vie en exil en Italie n’ayant pas laissé d’héritier.

Mieczyslaw (1799-1878) devait mourir dans une cellule d’une prison russe, condamné à mort par l’empereur de Russie Alexandre II : il laissera à son fils Nicolas la somme de 80 millions de Francs. Nicolas étant mort jeune, la lignée s’arrêtera avec lui.

Mieczysław_PotockiMieczyslaw Potocki (fils de Sofia)

Zofia (1801-1875), la fille ainée, épousera le comte Kiselvov et se séparera de ce dernier en 1830 et ira vivre à Paris. Elle mourut sans postérité.

220px-Sofia_Kiselyova_(Potocki)0Zofia Potocka comtesse Kiselvov (fille de Sofia)

Olga (1803-1861) se mariera avec le comte Narychkine et mourra à Paris en 1861 laissant une fille unique Sofia épouse Shuvalov.

Olga_Naryshkina_(Potocki)Olga Potocka comtesse Narychkine (fille de Sofia)

Quant à Boleslaw (1806-1875), il vivra à Nemirove et s’occupera de bienfaisance dans l’instruction publique. Il se mariera à la fille d’un feld marechal, Maria Saltykova et eurent une fille Maria épouse Stroganov.

Daffinger_-_Bolesław_PotockiBoleslaw Potocki (fils de Sofia)

Descendants de Zofia Clavone, comtesse Potocka :

 

Jusqu’aux arrière-petits-enfants.

Zofia Clavone, comtesse Potocka, née le 12 janvier 1760, Bursa, Turquie, décédée le 24 novembre 1822, Berlin (à l’âge de 62 ans).
Mariée le 14 juin 1779, Varsovie (Pologne), avec Joseph de Witt, né en 1739, décédé en 1814 (à l’âge de 75 ans), général russe, gouverneur de Kamanieck, divorcés, dont

Mariée le 28 avril 1798, Tulczyn, avec Szczęsny Potocki, né en 1751, décédé le 14 mars 1805, Tulczyn (à l’âge de 54 ans), wojewoda ruski, dont

Marié en 1844, Kijów, avec Emilia Świejkowska, née en 1824, Kiev, Russie, décédée le 13 juillet 1894, Paris 16è (à l’âge de 70 ans), dont

  • Włodzimierz, né en 1822, décédé en 1824 (à l’âge de 2 ans).

 

  • Boleslaw, né en 1806, décédé en 1875 (à l’âge de 69 ans).
    Marié en 1836 avec Marie Soltykova, née en 1816, décédée en 1845 (à l’âge de 29 ans), dont

 

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