Portrait par Pierre Mignard

Gouverneur de La Rochelle et du pays d’Aunis
Gouverneur du Nivernais

Né le 26 mai 1641 à Rome,
baptisé le 31 mai 1641 à Rome (église Sainte Marie in via Lata),
Mort le 8 mai 1707 à Paris à l’hôtel de Nevers
Enterré en l’église du collège Mazarin dit « des quatre nations », son cœur fut porté en l’église cathédrale de Nevers.

Philippe Julien Mancini est le fils du baron romain Michele Mancini (mort avant le 5 juillet 1657) et de Geronima Mazzarini (1614- morte le 29 décembre 1656 à Paris) qui fut la petite sœur du cardinal Mazarin.

Le cardinal Mazarin par école française (château de Versailles), oncle de Philippe Mancini

Il est le cinquième enfant du couple (sur dix enfants), ses frères et sœurs sont :

* Laure Victoire Mancini (née à Rome en 1636, morte le 4 février 1657 à Paris), elle épouse le 4 février 1651 à Paris Louis de Bourbon duc de Mercoeur (1612-1669) à qui elle donnera trois enfants.

* Paul Mancini (né en 1636 à Rome, tué le 18 juillet 1652 à Pontoise lors de la bataille de Paris), lieutenant capitaine des chevaux légers du roi.

* Olympe Mancini (née le 11 juillet 1637 à Rome, morte le 9 octobre 1708 à Bruxelles), elle épouse le 20 février 1657 Eugène Maurice de Savoie Carignan (1633-1673) voir sa biographie, à qui elle donnera neuf enfants.

* Marie Mancini (baptisée le 1er août 1639 à Rome, morte le 11 mai 1715 à Pise), grand amour de Louis XIV, qui épousera le 10 avril 1661 à Paris Lorenzo Onofrio Colonna, prince Colonna (1637-1689) à qui elle donnera quatre enfants.

Deux des soeurs de Philippe : Hortense (à gauche) et Marie Mancini par Jacob Ferdinand Voet

* Marguerite Mancini (née le 14 mars 1643 à Rome, morte jeune).

* Alphonse Marie Mancini (baptisé le 24 juin 1644 à Rome, mort le 5 janvier 1658 à Paris après un coup à la tête porté lors d’un « bizutage »).

* Hortense Mancini (née le 6 juin 1646 à Rome, morte le 12 juillet 1699 à Chelsea), elle épousera le 28 février 1661 au château de Vincennes Armand de la Porte, duc de Mazarin et de la Mailleraye (1632-1713), à qui elle donnera quatre enfants.

* Anne Mancini (née le 27 août 1647 à Rome, morte en 1649).

* Marie Anne Mancini (baptisée le 13 septembre 1649 à Rome, morte le 20 juin 1714 à Clichy), elle épousera le 20 avril 1662 à Paris Maurice Godefroy de la Tour d’Auvergne duc de Bouillon (1641-1721) à qui elle donnera dix enfants.

Il épouse le 14 décembre 1670 dans la chapelle royale du palais des Tuileries Diane Damas de Thianges (née en 1656, morte le 11 janvier 1715), voir sa biographie, nièce de Mme de Montespan, fille de Claude Léonor de Damas, marquis de Thianges (1620-1702) et de Gabrielle de Rochechouart de Mortemart (1634-1693), voir sa biographie.

Le couple aura les enfants suivants :
* Eloy Mancini (né et mort jeune).
* Gabriel Mancini duc de Donzy (mort en mai 1683).

* Diane Gabrielle Victoire Mancini (née vers 1672, morte le 12 septembre 1716 à Paris), elle épousera le 6 avril 1699 Charles Louis Antoine de Hénin Liétard, prince de Chimay (1675-1740), sans postérité.

* Philippe Jules François Mancini (né le 3 octobre 1676 à Paris, mort le 14 septembre 1768 au Louvre) marquis de Vergagne, il épousera le 4 juin 1709 Marianna Spinola (1686-1738) dont il aura un fils Louis Jules duc de Mazarin (1716-1798).

* Diane Adélaïde Philippe Mancini (née en 1687, morte le 29 septembre 1747 au château d’Anet suite à une chute de cheval), elle épouse le 17 août 1707 à l’abbaye de Saint Germain Louis Armand duc d’Estrées, sans postérité .

* Jacques Hippolyte Mancini (né le 2 mars 1690 à Paris, mort le 24 novembre 1759 à Paris), marquis de Mancini, il épouse le 24 septembre 1719 Anne Louise de Noailles (1695-1773) veuve de Jean François Macé le Tellier marquis de Louvois, dont il aura une fille Diane (1726-1755), future marquise d’Alençon. Il héritera des biens italiens de son père.

Portrait de Diane de Thianges, duchesse de Nevers par Mignard (en compagnie de son fils Gabriel et de sa fille Diane Gabrielle Victoire) vers 1675 (vendu par Christies le 29-5-2001)

Sur ordre de son oncle le cardinal Mazarin, il arrive à Paris en compagnie de sa mère et de ses sœurs. Il fut placé au collège de Clermont. Ses maîtres ne se louent pas de lui : il est inappliqué, fantasque, sujet à des coups de tête. Très jeune, il côtoie le jeune roi et devient l’un des intimes du frère de ce dernier, le duc d’Anjou, Philippe, futur duc d’Orléans. Il fréquente aussi le salon de Paul Scarron et y rencontre l’épouse de ce dernier, Françoise d’Aubigné la future Mme de Maintenon.

S’il a raté sa période scolaire, il possède cependant un bel esprit, et il sera plus tard l’un des assidus du salon de Mme des Houlières. Il adore la poésie et rédige aussi bien en français qu’en italien. Il ne manque ni d’intelligence ni d’instruction mais son oncle décide pour lui d’une carrière militaire.

En 1654, c’est lui qui porte la queue du manteau royal de Louis XIV lors du sacre. : cet honneur donnait le privilège d’être reçu chevalier des ordres du roi (cordon bleu) à n’importe quel âge.

Le sacre de Louis XIV à Reims le 7 juillet 1654 (le jeune Philippe portera la queue du manteau royal)

En 1655, il obtient un brevet d’officier et sert sous Turenne : il est même blessé au siège de Condé. Il montre de la bravoure, et un sonnet bienveillant sur l’un des neveux Mancini (pour une fois!) circule sur lui :

En 1657, à l’age de seize ans, le cardinal Mazarin obtient pour Philippe Mancini la position de capitaine lieutenant des mousquetaires du roi.

A l’origine, le cardinal Mazarin favorisait son neveu Paul Mancini, frère aîné de Philippe, et il voulait en faire son héritier unique mais la mort précoce de ce dernier lors de la bataille du faubourg Saint Antoine, (à cette même bataille, Philippe est fait colonel), oblige le cardinal à modifier ses plans, mais sans grande chaleur, puisque Philippe est le seul neveu de son sang qui lui reste.

Et la conduite du jeune homme dans les mois qui viennent ne modifie pas l’opinion négative que son oncle lui porte : le jeune Mancini fait partie de la petite troupe de seigneurs compromis dans l’affaire du château de Roissy (château appartenant à la belle mère de Vivonne, frère de Mme de Montaspan) : lors de la semaine sainte, Vivonne a réuni auprès de lui une troupe de joyeux drilles : il y a là Philippe Mancini, Roger de Bussy Rabutin, Armand de Guiche, Bernard de Manicamp et l’abbé le Camus. Les excès semblent avoir culminé jusqu’au vendredi saint : les jeunes seigneurs auraient baptisé des grenouilles, voire un cochon avant de le manger, le repas fut accompagné des éternels médisances sur le roi et la cour. Mais les domestiques présents laissent filtrer ce qui s’est passé, et c’est le scandale, la rumeur enfle les accusant d’avoir mangé de la chair humaine !

Philippe Mancini duc de Nevers

Le cardinal (et le roi) sont verts de rage, les impertinents sont chassés de la cour, mais le cardinal agit plus sévèrement vis à vis de Philippe qui est enfermé au fort de Brisach, à la frontière allemande. Il y est toujours enfermé au mois d’août, et malgré une tentative d’évasion avortée, doit se mettre à apprendre l’allemand (langue qui l’horripile), de plus le gouverneur de Brisach, sur les ordres de Mazarin l’oblige à se lever tôt, à s’exercer aux armes et à étudier. Pendant ses longues heures d’inactivité, Philippe va en profiter pour se lancer dans ce qui sera sa nouvelle passion : la poésie.

Bussy Rabutin exemptera pourtant le jeune homme, et confiera dans ses écrits que Philippe n’était resté que la première journée au château de Roissy, et n’avait pas participé aux orgies. Mais le cardinal s’accommodait mal de cet héritier poète à ses heures, sans ambition, indépendant, distrait, qui ne convenait ni aux affaires, ni à la cour. Il décida alors de ne pas en faire son héritier universel : dans son testament, le cardinal décida de laisser la majeure partie de sa fortune à sa nièce Hortense (y compris les tableaux et les meubles) et à son mari Armand duc de la Meilleraye, à charge pour ce dernier de porter son nom de Mazarin.

Pour Philippe qu’il ne souhaitait quand même pas totalement déshérité, il entreprit de racheter le 15 décembre 1659 à Charles de Gonzague duc de Mantoue (qui se retire sur ses terres italiennes) les duchés de Nevers, de Mayenne et de Rethel avec la baronnie de Donzi : il fera don de ses terres dans son testament à son neveu Philippe Mancini .

Hôtel de Nevers (rue de Richelieu à Paris) résidence parisienne de Philippe Mancini duc de Nevers

Philippe est relaché de Brisach pour assister aux noces du roi Louis XIV à Saint Jean de Luz le 9 juin 1660. Il accompagnera même le jeune roi lors de l’escapade de ce dernier à Brouage, où Louis XIV visitera la mort dans l’âme les lieux qui ont accueilli l’exil de son amour de jeunesse, Marie Mancini, sœur de Philippe.

La mort du cardinal Mazarin en mars 1661 permet à Philippe d’hériter d’une jolie fortune de son oncle : le cardinal lui lègue le duché de Nevers mais aussi les gouvernements de la Rochelle et du pays d’Aunis. Mais ce dernier, s’étant méfié de Philippe et de sa prodigalité, donnera par testament une partie de son palais à Hortense et son mari, et l’autre partie à Philippe, qui en fera le futur hôtel de Nevers. Mais Philippe n’est pas encore majeur (la majorité est fixé alors à vingt cinq ans), c’est donc Colbert qui administrera ses biens en France et son oncle paternel, le cardinal Mancini s’occupera des biens italiens : le palais de Monte Cavallo et celui de la via des Corso que le cardinal Mazarin a légué à son neveu.

Le palais de Monte Cavallo à Rome, résidence de Philippe Mancini, duc de Nevers

Le 31 décembre 1661 il est reçu chevalier des ordres du roi bien qu’il n’ait que vingt cinq ans, mais les rapports avec le roi sont tendus ; ce dernier s’irrite de l’homosexualité non caché de Philippe Mancini, ainsi que du désintérêt de celui-ci pour son corps des mousquetaires qu’il néglige.

En hiver 1662, Philippe Mancini part en Italie où il restera tout l’hiver à Venise. Il rend visite à sa sœur Marie Mancini maintenant devenue princesse Colonna et assiste même à la naissance de son fils le 7 avril 1663 qui portera le prénom de Filippo. A l’été, il revient en France en prenant tout son temps sur les chemins du retour.

En 1667, le roi tranche soudainement et retire le commandement des mousquetaires à Philippe Mancini pour le confier à Charles de Batz Castelmore, seigneur d’Artagnan (qui l’administrait dans l’ombre depuis plusieurs années). Cette même année, Philippe Mancini aide sa sœur Hortense à échapper à l’influence de son mari fantasque, et lui permet de gagner Rome où l’attend leur sœur aînée Marie Mancini. Il restera un long moment en Italie, et y fera pendant sa vie de fréquents et longs séjours. Il aimait l’Italie, il y vivait plus libre qu’ailleurs.

Portrait d’Hortense Mancini, sœur de Philippe, par Benedetto Gennari (Musée des Beaux Arts Valenciennes)

Saint Simon le décrit ainsi :
… c’était un italien très italien, de beaucoup d’esprit, facile, extrêmement orné, qui faisait les plus jolis vers du monde, et sur le champ… un homme de la meilleure compagnie, mais qui ne se souciait de quoi que ce fut, paresseux, voluptueux…

et physiquement :
…. il était grand, sec, mais bien fait, et dont la physionomie disait tout ce qu’il était….

An 1670, à l’âge de vingt neuf ans, il est l’un des célibataires les plus recherchées des familles en mal de gendre. Et notamment de Mme de Montespan, qui a une nièce à marier rapidement, et elle compte bien, avec l’accord du roi, obtenir le consentement de ce dernier pour que le duc de Nevers épouse sa nièce Diane Damas de Thianges (très belle mais sans un sou), fille de sa sœur Gabrielle de Rochechouart.

Mme de Sévigné se régale d’annoncer ce mariage dans une de ses lettres adressée à son gendre le comte de Grignan :

….…..ma fille me prie de vous mander le mariage de Mr de Nevers : ce Mr de Nevers si difficile à ferrer, ce Mr de Nevers si extraordinaire, qui glisse des mains alors qu’on y pense le moins, il épouse enfin, devinez qui ? ce n’est point Melle d’Houdancourt, ni Melle de Grancey, c’est Melle de Thianges, jeune, jolie, modeste, élevée à l’Abbaye aux Bois. Mme de Montespan en fait les noces dimanche, elle en fait comme la mère, et en reçoit tous les honneurs. Le roi rend à Mr de Nevers toutes ses charges ; de sorte que cette belle qui n’a pas un sou, lui vaut mieux que la plus grande héritière de France. Mme de Montespan fait des merveilles partout….”

Philippe n’ose pas désobéir aux ordres du roi et donne son accord pour le mariage. Il n’a jamais vu sa fiancée cloîtrée dans un couvent parisien, et mettra six mois (il est alors en Italie auprès de sa sœur Marie) pour revenir tranquillement en France, par des chemins détournés en prenant tout son temps pour parvenir à Paris.

Une fois arrivé sur les lieux, en décembre 1670, le mariage est promptement arrangé : le roi et Mme de Montespan appose leur signature sur le contrat. « Bérénice », la pièce de Racine est jouée lors de son mariage.

Philippe Mancini, (« Monsieur de Nevers » comme on l’appelle alors), découvre alors sa future femme : elle est ravissante, et est à peine âgée de quinze ans, mais déjà les deux époux s’apprécient mutuellement.

Cet homme blasé, amoureux des femmes comme des hommes, est tout simplement tombé amoureux de sa jeune femme, qui le lui rend bien.

Ce couple plutôt mal assorti va fonctionner admirablement bien provoquant l’admiration de Saint Simon :

…. Le duc de Nevers épousa en 1670 la plus belle personne de la cour, fille aînée de Mme de Thianges et nièce de Mme de Montespan. Il fut souvent jaloux fort inutilement mais jamais brouillé avec sa femme, qui était fort de la cour et du grand monde ; il ne l’appelait jamais que Diane…”

La beauté de la duchesse de Nevers est reconnue par Mme de Sévigné :

…...Mme de Nevers était belle comme le jour, elle brille fort sans qu’on en soit en peine…

et Saint Simon rajoute :

…Peu de femmes l’avaient surpassée en beauté. La sienne était de toutes les sortes, avec une singularité qui charmait. On ne pouvait se lasser de lui entendre raconter les aventures de ses voyages d’Italie…Mme de Nevers à plus de soixante ans était encore parfaitement belle,

Diane de Thianges par Pierre Mignard

En 1671, la toute jeune duchesse de Nevers est l’arbitre des élégances, elle lance une nouvelle coiffure qui fait fureur « la coiffure en hurluberlue », Mme de Sévigné raconte :

...tous les cheveux coupés sur la tête et frisée naturellement par cent papillotes, qui lui font souffrir toute la nuit mort et passion ; tout cela fait une petite tête de chou ronde, sans nulle chose sur les côtés : toute la tête nue et hurlupée….

Mme de Sévigné s’empresse de l’imiter.

Les habitudes du duc de Nevers ne changent pas après son mariage : il est poète, paresseux et surtout grand voyageur. Il passe une partie de sa vie à Rome et en revient à l’improviste comme il y était allé.

Saint Simon raconte :

….Il lui arrivait, d’entrer le matin dans la chambre de sa femme, de la faire lever tout de suite, de la faire monter en carrosse, sans qu’elle ni pas un de ses gens se fussent doutés de rien, et de partir là pour Rome sans le moindre préparatif, sans que lui même y eut songé quatre jours auparavant.

Mme de Caylus confirme :

………Mr de Nevers avait accoutumé de partir pour Rome de la même manière dont on va souper, et on a vu Mme de Nevers monter en carrosse, persuadée qu’elle allait seulement se promener, entendre dire à son cocher : « A Rome ! »…..

Le roi se montrait contrarié de cet homme insaisissable et imprévisible, et aurait souhaité que Mme de Nevers demeura plus souvent à Paris. Mme de Sévigné et Mme de Caylus chuchotent dans leurs lettres que le roi avait des vues sur la belle Diane de Thianges. En effet, Mme de Montespan (voyant sa faveur déclinée) aurait volontiers glisser sa nièce dans le lit du roi afin que cela reste « en famille ».

Hôtel de Nevers (rue de Richelieu à Paris) : la cour intérieure

Selon Mme de Caylus :

…. Mme de Montespan fit ce qu’elle pouvait pour inspirer au roi du goût pour sa nièce, mais il ne donna pas dans le piège soit qu’on s’y prit d’une manière trop grossière, ou que sa beauté n’eut pas fait sur lui l’effet qu’elle produisait sur tous ceux qui la regardaient….

Hélas, les regards du roi étaient déjà tournés vers la belle Angélique de Scorailles, Melle de Fontange.

Mais Mme de Sévigné souligne que le roi n’est pas le seul à qui la belle Mme de Nevers fait tourner la tête : en effet, le prince de Condé (fils du Grand Condé) est tombé éperdument amoureux de la belle Diane. Bien conscient que pour pouvoir garder Mme de Nevers, il lui fallait d’abord amadouer le mari, le prince de Condé eut l’idée un jour de donner une fête à Chantilly. Il rusa pour demander au duc de Nevers de composer les vers des divertissements, prétextant que son poète officiel lui ayant fait faux bon. Philippe Mancini, poète dans l’âme, ne se le fit pas dire deux fois, et accepta d’exécuter la besogne de bonne grâce.

Henri Jules de Condé tomba fou amoureux de la belle Diane de Thianges duchesse de Nevers

On commença à rire sous cape et à se moquer du mari berné, mais Philippe Mancini se rendit compte du subterfuge et des intentions du prince de Condé, et réagit en mari jaloux et imprévisible comme le raconte Saint Simon :

… Mr de Nevers, tout jaloux, tout italien, tout plein d’esprit qu’il fut n’avait pas conçu d’abord le plus léger soupçon mais peu de jours avant la fête à Chantilly, il découvrit de quoi il s’agissait, il n’en dit mot, et partit le lendemain pour Rome avec sa femme, où il demeura longtemps et se moqua bien de Mr le Prince à son tour…..

En 1677, Il se distinguera bientôt dans la cabale des deux  « Phèdre » : la pièce crée par Racine et la pièce crée par Pradon. Il appuiera la représentation de cette dernière (dix) et cela lui coûtera la somme de 15 000 livres.

Le tout Paris va bientôt lui attribué ce sonnet ironique sur la « Phèdre » de Racine  :

Racine et ses amis (le comte de Fiesque, le marquis de Manicamp et d’Effiat, le chevalier de Nantouillet) soupçonnèrent la plume du duc de Nevers, et répondit par le sonnet suivant (sur les même rimes) :

L’attaque à peine déguisée sur sa sœur Hortense (en fuite de son mari), et qui erre alors dans toute l’Europe, le fait bondir de fureur. L’évocation de relations incestueuses entre lui et sa sœur l’enrage, cela lui rappelle trop les « Mazarinades » de jadis, et il promet à Racine et à ses amis de les faire succomber sous une volée de bois vert. Racine et son ami Boileau s’empressent alors de déclarer qu’ils ne sont pas les auteurs des rimes calomnieuses, et se rapprochent du prince de Condé (le Grand Condé), ennemi de la famille Mazarin, qui les accueille volontiers dans son hôtel parisien leur offrant l’asile et proclamant à qui veut l’entendre qu’il est leur protecteur.

La colère du duc de Nevers finit par s’apaiser, et il se réconcilia avec Racine.

Très habile avec une plume, le duc de Nevers sera l’auteur en 1681 d’un livret de l’opéra de Lorenzani « Nicandro e Fileno ». Saint Simon reconnaît qu’il faisait « les plus jolis vers du monde ». La bibliothèque de l’Arsenal renferme d’ailleurs un recueil manuscrit des poésies du duc de Nevers regroupant des épîtres échangées entre le duc, le prince de Conti et le marquis de Dangeau. Toute sa vie, le duc de Nevers manifestera un goût profond pour la poésie.

C’est dans son hôtel de Nevers à Paris que « Pomone » de Perrin et de Cambert fut répété avant d’être représenté en mars 1671 au jeu de Paume.

Voltaire le mentionnera dans son « siècle de Louis XIV » : « il est un auteur de vers singuliers, qu’on entend très aisément et avec grand plaisir ».

Le duc de Nevers est l’auteur d’un huitain, écrit contre le célèbre réformateur de La Trappe, l’abbé de Rancé :

Il sera l’auteur de plusieurs écrits (écrit aussi bien en italien qu’en français) :

* Défense d’un poème héroïque
* Remarques sur les œuvres satiriques du sieur D (Boileau)
* Abrégé de l’histoire de France depuis la troisième race
* Epître à Mr Bourdelot (médecin de la reine Christine)
* Epître à Mr du Charmel
* Epître à un de ses amis.
* Le parfait cocher.

On soupçonne même Molière d’avoir caricaturé le duc de Nevers dans son personnage d’Oronte du « Misanthrope. »

Mais contrairement à la Rochefoucauld qui publiera ses « Maximes », le duc de Nevers ne fera connaître ses vers qu’à un petit nombre d’intimes. Ses œuvres étaient difficiles à obtenir, et même Mme de Sévigné se plaint de ne pouvoir les lire (à son cousin l’abbé de Coulanges) :

…..Apportez moi, les poésies de Mr de Nevers : elles sont d’un goût si singulier et si relevé, qu’on ne peut s’empêcher de blâmer le soin qu’il prend de les cacher si cruellement. Quoi! Vous êtes admis dans les sacrés mystères de ce solitaire ménage ! Je vous admire d’avoir osé attaquer le caprice du mari et la délicatesse de la femme ; je savais bien qu’elle était adorable, mais je vous avoue que je ne savais pas que ce fut pour vous…. vos lettres ont toujours été accompagnées des ouvrages de Mr de Nevers dont j’ai fait un petit recueil que je ne donnerais pas pour bien de l’argent….

L’abbé de Coulanges, lorsqu’il se rendait à Rome, avait le privilège d’être invité au palais de Monte Cavallo à Rome (résidence du duc de Nevers), il apparaissait aussi à l’hôtel de Nevers à Paris, ainsi qu’au château de Fresnes, les résidences habituelles de Philippe Mancini.

Louis-Jules Mancini-Mazarini (1716-1798) duc de Nivernois, Ministre d’Etat

En plus de régaler ses hôtes avec ses vers, le duc de Nevers était un hôte accompli (comme le racontera Chaulieu à La Fare) :

… nous avons fait les meilleurs et les plus délicieux soupers qu’on puisse faire chez Mr le duc de Nevers, la compagnie y est exquise et peu nombreuse, qui joignait seulement les grâces de Mortemart à l’imagination de Mancini…

Pour la grace des Mortemart, il s’agit, bien sur, de Diane de Thianges qui préside les banquets de son époux : elle a hérité de la beauté des Mortemart, mais n’a pas hérité de leurs défauts : elle n’est ni orgueilleuse, ni médisante, ni légère. La duchesse de Nevers est cultivée, fidèle et accomodante. De plus, malgré les années, elle est toujours aussi amoureuse de son époux.

La marquise de Lambert par Nicolas de Largillière

Lorsqu’il était à Paris, le duc de Nevers côtoyait le salon de la marquise de Lambert, sa voisine, quelque fois l’hôtel de Rambouillet, mais il préférait les soupers au Temple chez son ami Philippe de Bourbon, le chevalier de Vendôme (voir sa biographie) ce qui lui permettait de sortir des saillies un peu plus libres que dans les salons de ces dames.

Dans ses vers, le libre penseur qu’il est réprouve le jansénisme, mais approuve la révocation de l’édit de Nantes. Il se rangera plus tard dans le parti de Fénelon contre celui de Bossuet.

En vieillissant, il s’éloigne de la compagnie joyeuse du Temple, et devient l’un des habitués de la duchesse du Maine au château de Sceaux.

Il continue décrire, et Diane, son épouse est toujours sa muse favorite :

Sources :
Père Anselme (tome V).
Mémoires du duc de St Simon.
Nouvelle biographie universelle.
Les nièces de Mazarin : études de mœurs.
Wikipedia.
La tribu Mazarin de Yvonne Singer Lecocq.

Descendants de Philippe Julien Mancini-Mazarini duc de Nevers :

Jusqu’aux petits-enfants.

Philippe Julien Mancini-Mazarini, duc de Nevers (10e), duc de Donzy, né le 26 mai 1641, Rome, baptisé le 31 mai 1641, église Sainte Marie in via lata à Rome, décédé le 8 mai 1707, hôtel de Nevers, Paris, inhumé, église du collège Mazarin, et le coeur enterré dans l’église-cathédrale de Nevers (à l’âge de 65 ans), gouverneur et lieutenant général du Nivernais.
Marié le 14 décembre 1670, chapelle royale du palais des Tuileries, Paris, avec Diane Damas de Thianges, née en 1656, décédée le 11 janvier 1715 (à l’âge de 59 ans), dont

• Eloy, mort jeune.
• Gabriel, duc de Donzy, décédé en mai 1683.
• Diane Gabrielle Victoire, née vers 1672, décédée le 12 septembre 1716, Paris (à l’âge de peut-être 44 ans).
  Mariée le 6 avril 1699 avec Charles Louis Antoine de Hénin-Liétard, comte de Boussu, prince de Chimay (11e, 1688), né le 22 août 1675, Bruxelles, décédé le 3 février 1740, Bruxelles (à l’âge de 64 ans), lieutenant général des armées du roi de France.
• François, duc de Nevers (11e), duc de Donziois, prince de Vergage et du Saint-Empire, né le 3 octobre 1676, Paris (75), baptisé le 21 janvier 1688, Paris (75) – paroisse S^t Eustache, décédé le 14 septembre 1768, Paris (75) – château du Louvre – en son appartement (à l’âge de 91 ans), grand d’Espagne de première classe.
  Marié le 4 juin 1709 avec Marianna Spinola, née en 1686, décédée le 11 janvier 1738 (à l’âge de 52 ans), dame d’honneur de Françoise Marie de Bourbon duchesse d’Orléans, de 1692 à 1738, dont
  • Louis Jules, duc de Nevers (12e), né le 16 décembre 1716, Hôtel Mazarin (actuelle Bibliothèque Nationale), Paris, (75), baptisé le 3 avril 1723, St-Germain-l’Auxerrois, Paris (75), décédé le 25 février 1798, Paris (75) (à l’âge de 81 ans), ambassadeur de France.
    Marié le 17 décembre 1731, chapelle de l’hotel de Mortemart, avec Hélène Phélypeaux de Pontchartrain, née en mai 1715, décédée le 10 mars 1782 (à l’âge de 66 ans), dame du palais de la reine Marie Lecszinska le 3 avril 1745 jusqu’en 1748.
    Marié le 14 octobre 1782, Paris, avec Marie Thérèse de Brancas, née le 2 avril 1716, décédée le 5 décembre 1782 (à l’âge de 66 ans).
• Diane Adélaïde Philippe, née en 1687, décédée le 29 septembre 1747, château d’Anet, Anet (Eure-et-Loir), inhumée, église paroissiale d’Anet (à l’âge de 60 ans).
  Mariée le 17 août 1707, à l’abbaye de Saint-Germain, avec Louis Armand, duc d’Estrées (4e, 11 septembre 1698), marquis de Coeuvres (1698), marquis de Thémines et de Cardaillac, vicomte de Soissons, né le 3 septembre 1682, Paris (75), baptisé le 3 octobre 1682, décédé le 16 juillet 1723, Paris (75) – palais du Luxembourg, inhumé, paroisse S^t Sulpice (à l’âge de 40 ans).
• Jacques Hippolyte, marquis de Mancini, né le 2 mars 1690, Paris, baptisé le 16 mai 1690, église St Eustache à Paris, décédé le 24 novembre 1759, Paris (à l’âge de 69 ans).
  Marié le 24 septembre 1719 avec Anne-Louise de Noailles, née le 26 août 1695, décédée le 19 mai 1773, Paris (75) (à l’âge de 77 ans), dont
  • Diane, née le 3 février 1726, décédée en juin 1755, inhumée, chapelle de l’église Saint-Étienne de Claye-Souilly (77) (à l’âge de 29 ans).
    Mariée le 16 décembre 1738 avec Louis Héracle de Polignac, vicomte de Polignac, baron de La Voulte, marquis d’Alençon, seigneur de Claye, né le 11 janvier 1717, Paris, décédé en 1792, Vienne (Autriche) (à l’âge de 75 ans), maréchal de camp, premier écuyer du comte d’Artois, ambassadeur.

Total: 8 personnes (conjoints non compris).